Qu’est ce que HNF1B ?

 

Il s’agit d’une maladie génétique rare dont la fréquence est mal connue (probablement 1/50.000 à 1/80.000 habitants). La caractérisation de la maladie, la grande variabilité des symptômes à l’intérieur d’une même famille, leur caractère souvent non spécifique et l’existence de forme extrêmement modérée (début de symptômes après 40 ans) expliquent en partie les difficultés du diagnostic et de l’évaluation de l’incidence de cette maladie. La variabilité du mode de présentation (néphrologique, diabétologique, hépatologique, gynécologique) complique également l’identification de la pathologie.

La maladie liée à HNF1B est à transmission autosomique dominante, c’est-à-dire que le risque de transmission de la maladie d’un parent à son enfant est de 50%.

Toutefois, environ la moitié des patients présente une néo-mutation, c’est-à-dire que les deux parents sont indemnes et ne portent pas d’anomalie moléculaire d’HNF1B. Le conseil génétique sera alors tourné vers les descendants du patient. Deux type d’anomalie moléculaire peuvent être identifiées : une délétion ou une duplication d’une région chromosomique incluant le gène HNF1B (délétion ou duplication 17q12), ou une mutation ponctuelle du gène aboutissant à une protéine tronquée ou anormale.

HNF1B est gène exprimé dans un grand nombre d’organe (reins, pancréas, organes génitaux, foie, tube digestif, système nerveux central), au cours de leur développement ou à l’âge adulte. Les symptômes de la maladie liée à HNF1B seront donc liés à un mauvais développement de ces organes (malformations) ou à leur destruction progressive (défaut de fonction). Selon les anomalies identifiées, le diagnostic pourra donc intervenir pendant la grossesse (échographie anténatale systématique), pendant l’enfance ou à l’âge adulte. Parfois, la maladie est asymptomatique et n’est identifiée qu’à la faveur d’un dépistage systématique des apparentés d’un individu atteint.

Le rein est l’organe le plus fréquemment atteint. Chez le fœtus, des reins hyperéchogènes, de taille normale ou légèrement augmentée et avec des microkystes corticaux sont associés à une anomalie d’HNF1B dans environ 50% des cas. Des dysplasies multikystiques uni ou bilatérales, ou un rein unique peuvent parfois être observés. Chez l’enfant, un trouble de concentration des urines (diurèse abondante et soif), des reins de petite taille (hypoplasie rénale uni ou bilatérale) parfois le siège de quelques kystes corticaux ou cortico-médullaires, doivent faire évoquer une mutation d’HNF1B. Enfin, une atrophie progressive d’un rein en dysplasie multikystique peut aboutir à l’identification tardive d’un unique rein fonctionnel.

Les tests sanguins identifient une hypomagnésémie chez plus de 50% des patients. L’insuffisance rénale est habituellement observée après la deuxième décennie mais peut parfois se développer dès les premières années de vie et nécessiter un recours à une épuration extra-rénale. A l’âge adulte, la néphropathie liée à HNF1B se présente comme une néphropathie lentement évolutive avec une fuite urinaire de magnésium et de potassium. Les reins ont une taille normale ou diminuée et ont peu ou pas de kystes (< 5-10/rein). L’insuffisance rénale progresse indépendamment de la progression du contingent kystique. Parfois, une aggravation brutale et irréversible de l’insuffisance rénale est observée. Malgré la fréquence du diabète sucré dans cette pathologie (cf. infra), une atteinte rénale secondaire au diabète (glomérulopathie diabétique) est rarement observée.

Le pancréas est le deuxième organe le plus touché. Un diabète sucré se développe chez 50 à 70 % des patients mais à des âges extrêmement variables (en moyenne entre 18 et 45 ans). C’est un diabète non immunologique, qui intervient chez des individus sans surpoids, et dont le début peut être lent (bilan systématique) ou explosif (acidocétose). Un diabète gestationnel est fréquent. Un régime adapté et un traitement antidiabétique par voie orale sont habituellement suffisants à la phase initiale pour contrôler la glycémie. L’insulinothérapie est débutée d’emblée dans les formes sévères, ou après plusieurs années en cas de progression de l’insuffisance rénale chronique ou de diabète mal contrôlé.

Par ailleurs, une insuffisance pancréatique exocrine à l’origine d’une malabsorption des graisses et des vitamines liposolubles (A, D, E, K) est identifiée chez 30 à 50% des patients testés. Elle peut s’accompagner de ballonnement digestif mais est le plus souvent asymptomatique. Un traitement par enzymothérapie substitutive doit être envisagé. L’imagerie pancréatique montre chez 30 à 40% des patients une hypoplasie du corps et de la queue du pancréas, plus rarement d’autres types de malformation.

L’atteinte hépatique est fréquente (50-75% des individus) mais habituellement asymptomatique. Il s’agit principalement d’anomalies des tests hépatiques (cytolyse ou cholestase anictérique fluctuante et de faible intensité). Aucune anomalie morphologique spécifique, en particulier kystique, n’a été rapporté jusqu’à présent ce qui la différencie d’autres maladies kystiques hépato-rénales également autosomique dominante. L’évolution est indolente et aucun cas de cirrhose n’a été rapporté à ce jour.

L’atteinte génitale est fréquente (> 40%) et probablement sous-estimée. Chez la femme, elle peut se présenter sous la forme d’un utérus bicorne, d’une hémiagénésie utérine voire plus rarement d’un authentique syndrome de Rokitanski, c’est-à-dire l’absence d’utérus et une hypotrophie du vagin. Ces malformations peuvent de fait s’associer à des difficultés de conception. Chez l’homme, des agénésies uni ou bilatérales des canaux déférents, une ectopie testiculaire ou des kystes de l’épididyme ont été rapportés. L’infertilité pouvant découler de ces anomalies peut nécessiter le recours à une procréation médicalement assisté (fécondation in vitro) qui s’accompagnera d’un risque de transmission de la maladie de 50%.

Plus récemment, des troubles du développement psychomoteur et parfois une épilepsie ont été rapportés. Ces anomalies inconstantes et de sévérité variables sont identifiées chez des patients avec une mutation ponctuelle ou une délétion/duplication complète du gène. Dans de rare cas, l’atteinte est suffisamment sévère pour nécessiter une prise en charge neuropsychiatrique spécialisée pour accompagner le développement de l’enfant.

Le diagnostic de la maladie liée à HNF1B repose sur l’analyse moléculaire du gène. Deux techniques sont employées successivement. La première vise à identifier une délétion/duplication du gène (QMPSF ou MLPA, par exemple). Si cette première technique est négative, un séquençage direct du gène est réalisé à la recherche d’une mutation ponctuelle (50% des cas). L’analyse génétique est demandée devant un faisceau d’arguments cliniques, biologiques et radiologiques. La grande variabilité des symptômes et de leur âge de début ne doit pas faire récuser le diagnostic si le tableau est incomplet. Toutefois, l’absence de spécificité d’un bon nombre de manifestations cliniques de la maladie a pour conséquence un taux de détection de mutation faible (de 12 à 30% des individus testés en fonction du signe d’appel).

Il n’y a actuellement pas de traitement spécifique de la maladie liée aux mutations d’HNF1B. Le diagnostic génétique de cette affection, outre la possibilité d’un conseil génétique approprié, permet essentiellement d’élaborer un programme de surveillance adapté (diabète, insuffisance pancréatique exocrine, insuffisance rénale chronique). Cette surveillance doit être prolongée, des manifestations rénales ou pancréatiques pouvant être identifiées après la 5ème décennie. Le diagnostic moléculaire permet dans un certain nombre de cas d’éviter des examens complémentaires invasifs (p.ex. biopsie hépatique ou rénale).

Le traitement des diabètes associés aux mutations d’HNF1B diffère peu de la prise en charge habituelle. Un régime seul ou des antidiabétiques oraux (sulfonylurés en particulier) peuvent suffire pour obtenir un bon contrôle de la maladie. Plus rarement, un traitement par insuline doit être débuté à court terme.

Lorsqu’une insuffisance rénale est identifiée, le traitement reste symptomatique et ne diffère pas de la prise en charge habituelle de l’insuffisance rénale chronique. Si une transplantation rénale est envisagée, il convient de s’assurer de l’absence de mutation chez le donneur apparenté (situation de greffe familiale), et le traitement anti-rejet doit viser à une épargne maximale en cortisone et en inhibiteur de la calcineurine afin de réduire le risque de développer ou d’aggraver un diabète et l’atteinte hépatique après transplantation. L’identification d’une mutation d’HNF1B chez un individu atteint d’insuffisance rénale avancée et de diabète peut faire discuter une transplantation combinée rein – pancréas.

Enfin, le risque de 50% de transmission de la maladie aux descendants impose une réflexion sur la meilleure méthode de procréation médicalement assistée à utiliser chez les individus présentant une infertilité secondaire aux mutations d’HNF1B.

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Informations complémentaires  : Orphanet

Rédacteurs : Dr Stanislas FAGUER et son équipe (Toulouse)

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