Qu’est-ce que le syndrome néphrotique congénital (de type finlandais) ?

 

Les reins permettent, grâce aux glomérules, sortes de filtre ou d’« usines de tri des déchets », d’éliminer certains composants présents dans le sang et provenant surtout de l’alimentation, tels l’eau, le sel, l’urée venant des protéines présentes dans la viande ou les produits laitiers. Ce filtre est très sélectif et ne laisse pas passer certaines substances comme les protéines fabriquées par l’organisme.

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Un syndrome néphrotique survient lorsque ce filtre est trop perméable et que les reins laissent passer dans les urines de grandes quantités de protéines présentes dans la circulation sanguine, surtout de l’albumine. Il en résulte une diminution de la concentration d’albumine dans le sang et une difficulté des reins à éliminer le sel et l’eau provenant de l’alimentation. L’eau et le sel vont passer de la circulation sanguine dans les tissus et provoquer des œdèmes.

Le syndrome néphrotique est dit congénital lorsqu’il débute en anténatal ou dans les 3 premiers mois de vie.

Ce type de syndrome néphrotique est plus fréquent en Finlande avec la survenue d’un nouveau cas pour 8 200 naissances.

Il est également observé dans différents pays à travers le monde mais moins fréquemment (environ un nouveau cas pour 50 000 naissances).

Il résulte du dysfonctionnement d’un gène. Les mutations du gène NPHS1 qui permet la production d’une protéine appelée la néphrine, sont la première cause de la maladie aussi bien dans les familles finlandaises (95% des cas) que dans les familles d’autre origine (50% des cas). D’autres gènes sont également incriminés notamment le gène NPHS2 qui permet la production de la protéine podocine (voir la fiche « la-fonction-renale »).

Cette maladie est principalement de transmission autosomique récessive, c’est à dire qu’il faut avoir deux copies du gène porteuses de la mutation pour être malade (le plus souvent, une copie mutée a été transmis par chacun des parents qui ne sont pas malades).

Le syndrome néphrotique finlandais débute précocement durant la vie fœtale dès la quinzième semaine de gestation. Les reins peuvent être de grande taille et hyperéchogènes sur les échographies anténatales. Cette constatation peut amener à faire des dosages complémentaires chez la mère et le fœtus. Les enfants atteints sont prématurés dans plus de 80% des cas, avec un petit poids de naissance.

                               
Les symptômes présents à la naissance ou dans les 3 premiers mois de vie sont en rapport avec la carence protidique et l’excès d’eau et de sel dans l’organisme.

Il s’agit d’œdèmes généralisés, responsables d’une bouffissure des paupières le matin, d’un gonflement des chevilles dans la journée en position debout et parfois d’un gonflement de l’abdomen (ascite), des bourses chez le garçon (hydrocèle), d’un épanchement dans la plèvre qui entoure les poumons (épanchement pleural). Ces œdèmes sont gênants, mais le plus souvent ne sont pas dangereux.

Devant ces œdèmes, on peut facilement affirmer qu’il s’agit d’un syndrome néphrotique en recherchant la présence de protéines dans les urines.

Enfin, il peut être révélé par des complications diverses : infection, caillots dans la circulation (thrombose) qui peuvent se déplacer et entraîner une embolie pulmonaire

Le diagnostic est confirmé par une prise de sang et une analyse d’urines, puis complété le plus souvent par une analyse génétique et parfois une biopsie rénale. L’analyse génétique peut prendre plusieurs mois. Toutes les causes génétiques de syndrome néphrotique congénital ne sont pas encore connues.

Un diagnostic anténatal est possible, soit par une étude de l’ADN de toute la famille lorsque la mutation du gène responsable de la maladie n’est pas connue, soit par l’analyse du gène sur une biopsie de trophoblaste lorsque la mutation a été identifiée chez un enfant atteint dans la famille.

En dehors des œdèmes, souvent disgracieux mais habituellement sans conséquence sévère, le syndrome néphrotique expose à certaines complications.

Infections :

Les infections bactériennes sont fréquentes et peuvent survenir au début de la maladie. Il peut s’agir d’une péritonite (infection du péritoine) entraînant des douleurs abdominales vives et de la fièvre, d’une méningite, d’une pneumonie ou d’une cellulite (infection des tissus sous-cutanés). Toutes ces infections peuvent être contrôlées par les antibiotiques.

Les infections virales peuvent être favorisées par le traitement que l’on donne pour traiter le syndrome néphrotique comme la prednisone ou les immunosuppresseurs. C’est en particulier le cas de la varicelle qui peut être grave. Il existe des médicaments efficaces qu’il faut donner si la varicelle se déclare afin d’éviter les complications de cette maladie, et en cas de contact avec une personne atteinte de varicelle pour prévenir son apparition.

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Thromboses :

Le syndrome néphrotique est responsable d’anomalies de la coagulation qui augmentent le risque de formation de caillots dans la circulation. Ce sont les accidents de thrombose qui peuvent se localiser dans les veines des membres supérieurs ou inférieurs, les veines rénales, les vaisseaux cérébraux, les artères pulmonaires. Les caillots peuvent se déplacer et entraîner une embolie pulmonaire. Ces accidents peuvent être prévenus par la prise de médicaments appelés anticoagulants.

                           
Autres complications :

Lorsque les traitements ne sont pas efficaces et n’entraînent pas la rémission, la fuite urinaire des protéines peut être responsable, à long terme, d’un état de malnutrition avec fonte musculaire, d’un trouble de la croissance en taille, de perturbations du bilan lipidique et d’insuffisance thyroïdienne. Des lésions de sclérose peuvent apparaître et progresser au niveau des reins, entraînant une insuffisance rénale chronique dans un délai que l’on ne peut pas préciser, mais qui peut être de plusieurs années.

Certaines formes génétiques très rares sont associées à des atteintes d’autres organes (cœur, œil, système nerveux, organes génitaux..).

Les traitements visent à prévenir les complications du syndrome néphrotique. Pour diminuer les œdèmes, un régime sans sel, des perfusions d’albumine régulières et des diurétiques peuvent être prescrits.

On y associe selon les cas des traitements faisant diminuer la protéinurie et protégeant le rein, des anticoagulants pour limiter le risque de thrombose, des traitements réduisant les taux de cholestérol et de triglycérides, des antibiotiques et/ou des hormones thyroïdiennes de synthèse et/ou de l’hormone de croissance de synthèse.

Aucun traitement ne permet de guérir la maladie, et l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale est fréquente nécessitant la mise en dialyse et/ou une greffe rénale. Il faut parfois retirer les deux reins avant le stade de la dialyse et la greffe pour limiter les complications du syndrome néphrotique. Le risque de récidive du syndrome néphrotique après transplantation rénale est minime lorsque la mutation causale est connue.

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Informations complémentaires

Rédaction : Dr Olivia GILLION-BOYER (Paris – Hôpital Necker Enfants Malades), Dr Marie-France GAGNADOUX (Paris – Hôpital Necker Enfants Malades), Pr Vincent AUDARD (Créteil Henri Mondor) et Pr Vincent GUIGONIS (CHU Limoges).

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