Nephrogenic syndrome of inappropriate antidiuresis secondary to an activating mutation in the arginine vasopressin receptor AVPR2
Dans cet article de Clinical Endocrinology, Powlson et al proposent, à propos d’un cas de NSIAD mis en évidence chez un patient de 38 ans, une mise au point sur les connaissances actuelles sur cette entité décrite il y a une dizaine d’années et qui concerne les enfants comme les adultes.
Ils rappellent que les situations d’hyponatrémie sont fréquentes (15 à 20% des patients hospitalisés) avec une morbi-mortalité importante. Elles peuvent être hypo-, hyper- ou eu-volémique, cette dernière situation étant trés souvent secondaire à un SIADH dont la fréquence augmente avec l’âge mais avec un certain nombre de cas classés comme « idiopathiques ».
Chez ce patient porteur d’une hyponatrémie intermittente, la réalisation prudente d’un test de charge en eau (20 mk/kg) a montré un défaut d’élimination de l’eau ingéré avec un nadir de natrémie à 125 mmol/l, l’osmolalité urinaire restant supérieure à 800 mosm/kg alors que le dosage d’AVP plasmatique était effondré. Le séquençage de l’AVPR2 retrouvait la mutation R137C, connue comme étant responsable d’une activation constitutive de l’AVPR2.
Le NSIAD (nephrogenic syndrome of inappropriate antidiuresis) a été décrit initialement par Feldman et al chez deux nourrissons de sexe masculin présentant un tableau clinique et biologique évocateur d’un SIADH mais avec un taux de vasopressine (AVP) effondré. Chez chacun de ces deux patients, il avait été trouvé la présence d’une mutation activatrice du récepteur V2 de l’AVP : les mutants R137C et R137L (Feldman, B.J., Rosenthal, S.M., Vargas, G.A. et al. (2005) Nephrogenic syndrome of inappropriate antidiuresis. NEJM, 352, 1884–1890)
Ces mêmes mutations ont ensuite été décrites par Decaux et al chez des patients adultes également porteurs d’un phénotype de type SIADH mais avec une certaine variabilité phénotypique d’une part et dans les deux sexes d’autres part. (Decaux, G., Vandergheynst, F., Bouko, Y. et al. (2007) Nephrogenic syndrome of inappropriate antidiuresis in adults: high phenotypic variability in men and women from a large pedigree. JASN, 18, 606–612)
Plus récemment, trois autres mutations activatrices de l’AVPR2 ont été rapportées chez des patients, adultes et enfants responsables d’un tableau de NSIAD. Il s’agit des mutants :
– F229V (Carpentier, E., Greenbaum, L.A., Rochdi, D. et al. (2012) Identification and characterization of an activating F229V substitution in the V2 vasopressin receptor in an infant with NSIAD. JASN, 23, 1635–40)
– I130N (László S. Erdélyi W. Alexander Mann, Deborah J. Morris-Rosendahl, Ute Groß, et al (2015) Mutation in the V2 vasopressin receptor gene, AVPR2, causes nephrogenic syndrome of inappropriate diuresis.Kidney Int. 88 :1070-8)
– L312S (Anatoly Tiulpakov, Carl W White, Rekhati S Abhayawardana, Heng B See et al, Mutations of vasopressin receptor 2 including novel L312S have differential effects on trafficking Mol Endocrinol. 2016 Jun 29)
Au plan phénotypique, on note une grande variabilité d’expression avec un diagnostic pouvant être évoqué très précocement dans les premières semaines de vie alors que dans d’autres cas, le diagnostic peut être fait beaucoup plus tardivement, à l’âge adulte, par exemple à l’occasion d’un apport en eau d’importance inhabituelle, suggérant ainsi que ces patients limitent spontanément leurs apports hydriques.
Au plan thérapeutique, la restriction hydrique reste la base de la prise en charge. Un apport d’urée est également possible, permettant de maintenir une diurèse osmotique.
Il a été noté que les mutants R137C et R137L, responsables d’une activation constitutive de l’AVPR2, ne sont pas sensibles aux vaptans, antagonistes non-peptidiques de l’AVPR2. Cette insensibilité semble due au fait que ces mutations, qui concernent un résidu arginine très conservé au sein de la famille des récepteurs couplés aux protéines G, mettent le récepteur muté dans une conformation « active » bloquée et donc non réversible. Inversement, les données d’analyses fonctionnelles des mutants F229V, I130N et L312S, suggèrent que leur situation d’activation constitutive est sensible aux antagonistes de l’AVPR2. Les mécanismes moléculaires responsables de cette activation constitutive ne sont donc pas identiques selon la position de l’acide aminé concerné par la mutation. La réalisation d’un génotypage, s’il est possible, présente donc un intérêt important en termes de stratégie thérapeutique chez ces patients.
L’incidence exacte des cas de NSIAD n’est pas connue. Il semble s’agir d’une situation rare (une trentaine de cas rapportés depuis la description initiale). Il n’est cependant pas exclu que certaines situations cliniques décrites comme SIADH de type D soient en fait d’authentiques NSIAD. Il faut donc savoir y penser, chez l’enfant comme chez l’adulte, devant une hyponatrémie euvolémique avec des taux d’AVP plasmatiques bas. En sachant également que les deux sexes peuvent être concernés, certaines femmes pouvant être symptomatiques en situation d’apports hydriques inhabituels.
Andrew S. Powlson, Benjamin G. Challis, David J. Halsall, Erik Schoenmakers and Mark Gurnell. Clinical Endocrinology (2016) 85, 306–312
Mise en ligne : 21/07/2016